La boxe thaïlandaise, le Muay Thaï
La boxe Thaïe est un art, une discipline, qui exige du courage, de la persévérance, de la loyauté, du respect. Elle est pratiquée par les garçons comme les filles dès l’école. De nombreux petits clubs d’entraînement (appelés camps) parsèment le pays et accueillent les jeunes dès le plus jeune âge. Les voyageurs aimant sortir des sentiers battus lors de leur séjour sur mesure en Thailande auront de grande chance de pouvoir découvrir ces petits camps de boxe Thaïe locaux très discrets.
Assister à un gala de boxe thaïlandaise demeure une expérience étourdissante, où l’apparente violence des affrontements s’efface devant le respect des boxeurs pour leurs entraineurs, mais aussi leurs adversaires. Il est très courant en Thaïlande de voir deux boxeurs se partager une bière à l’issue d’un combat violent et sans pitié ! Des coutumes qui parfois s’effritent lorsque l’un des boxeurs n’est pas thaïlandais et ne connait pas les codes sociaux et les traditions ou encore les rituels ancestraux.
Une discipline très codifiée
Chez les professionnels, le combat se déroule en cinq rounds de trois minutes. Il est précédé par une danse rituelle : le Ram Muay, danse païenne et animiste, durant laquelle le Nak Muay (boxeur) porte le Mongkon (bande de tissu autour de la tête pour manifester le respect à son entraîneur et pour optimiser sa perception mentale), dans le but d’invoquer la protection d’esprits divers et variés. Elle est composée de gestes codifiés exécutés par les deux adversaires individuellement et qui sont propres à chaque école ou style. Elle amplifie l’ambiance électrique et rituelle qui enveloppe les lieux.
Le tout est exacerbé par la musique, entêtante avec ses sons très aigues et jouée par des musiciens en live pendant le combat.
Le petit orchestre composé d’un tambour, d’une cymbale et d’une flûte nasillarde, rythme les rounds.
Les musiciens accélèrent le tempo au rythme du combat et inévitablement, le spectateur est happé par ce vortex de flûtes et de percussions.
Et le spectacle ne se limite pas au ring, car l’ambiance dans la salle est toute aussi surprenante. Les bookmakers collectent les paris du public par une gestuelle complexe et les cris du public passionné rythment le combat !
« Tous les coups sont permis » ; ou presque !
Les coups autorisés sont les suivants : coups de poing, de coude, de genou, de tibia et de pied sur la totalité du corps.
La boxe thaïe se nomme “l’art des Huit Membres” car elle mobilise huit points de contact : coups de poings, de pieds, de genoux et de coudes.
Sont interdits les coups en direction de l’arrière de la tête, des parties génitales, le fait de s’aider des cordages, les morsures, les crachats, tirer les cheveux, frapper un boxeur à terre et mettre les doigts dans les yeux.
Les combattants sont torse nu, pieds nus et pourvus uniquement d’un short, de gants de boxe et de protections basiques qui se résument généralement à un protège dents et une coquille pour les parties génitales. Pour les moins de 16 ans, des protections plus importantes sont requises (casque, protège tibia etc…), mais il est très rare que cette loi soit respectée (ce que nous déplorons bien sur…). Ils évoluent sur un ring de cinq à sept mètres de côté avec trois rangées de corde. Les combattants sont repartis en treize catégories de poids.
Un arbitre présent sur le ring peut arrêter le combat à tout moment si un boxeur se trouve dans une situation dangereuse pour lui-même. Bien souvent, et c’est un trait d’esprit très Thaïlandais, le boxeur ira jusqu’au bout pour ne pas perdre la face, au risque de se mettre en danger, et l’arbitre assure une protection essentielle pour l’intégrité des sportifs.
Les clubs de boxe Thaïe se sont ouverts il y a déjà plusieurs décennies aux femmes qui sont souvent d’excellentes combattantes. D’ailleurs, pour les voyageurs sportifs souhaitant faire un voyage de noces, teinté d’aventure et d’expériences locales en Thaïlande, notre équipe propose souvent un petit cours de boxe Thaïe en couple pour se familiariser de façon ludique, et sans danger, à cette tradition.
Une tradition encore très vivante dans tout le royaume
Chaque semaine, des centaines de combats de boxe Thaïe ont lieu à travers toute la Thaïlande. Dans les provinces ils sont souvent organisés dans les temples Bouddhistes à l’occasion des fêtes locales. S’y affrontent alors des boxeurs de tout petits clubs locaux (souvent la maison de l’entraineur sous laquelle, pour tout matériel, des sacs de frappe ont été installés pour les entrainements). Les entrainements sont quotidiens et consistent généralement en un entrainement cardio le matin de très bonne heure, vers 5h, et un entrainement technique au retour du travail ou de l’école en milieu d’après-midi. Les boxeurs Thaïs sont tenus d’être de solides sportifs combinant rapidité, cardio, puissance, et bien sûr résistance aux coups parfois violents !
La discipline a acquis une popularité nettement supérieure à celle des autres sports de combat de l’Asie du Sud-Est, où coexistent cependant la boxe birmane, la boxe vietnamienne, la boxe khmère (Cambodge) et la boxe laotienne.
La forme de boxe thaïe moderne que l’on connaît est la plus ancienne de tous ces sports de combat.
Cette dernière appellation, en Thaïlandais « Muay Thaïe », éminemment authentique, est aussi la plus ancienne. On retrouve aussi dans son histoire, le krabi krabong, qui était un art martial pratiqué avec des armes.
Le gouvernement aussi bien que l’armée lui portent un grand amour : cela fait cinq siècles qu’il fait partie de l’entraînement des militaires locaux !
Les origines du Muay Thai
Avant l’introduction des gants de boxe contemporains venus du monde occidental, les boxeurs thaïlandais traditionnels paraient leurs poings de crin de cheval, puis de coton enduit de colle.
C’est dès le XVIe siècle que le Muay Thaï a été créé dans une version proche de celle qui a cours de nos jours.
C’est grâce aux chroniques royales écrites lors du règne de Rama Ier (1737-1809), que l’on a pu remonter les traces des pratiques de la boxe thaïe à l’époque moderne.
L’origine de la boxe thaïe est donc impossible à dater avec précision. On lira la légende pour mieux comprendre.
Celle-ci raconte que l’origine de cette boxe remonterait au XVe siècle, lorsque le roi Sen Muang Ma décéda, en 1411.Ses deux fils Ki et Fang se seraient affrontés lors d’un duel au corps à corps afin de se départager l’exercice du pouvoir. Fang aurait été battu, laissant Ki monter sur le trône.
Ainsi serait née la discipline.
Encouragée par le roi Naresuan-le-Grand (1555-1605), elle fut ensuite introduite dans les entrainements militaires.
Elle devient populaire sous le règne du “Roi Tigre”, Phrachao Sua (1661-1709).
Sous ce règne, la boxe thaïe devient l’activité de loisir favorite de la population et le roi lui-même, vient défier les champions locaux.
La légende raconte qu’un soldat et boxeur, Naï Khanon Tom, aurait été capturé et emprisonné par les troupes birmanes lors de la chute d’Ayutthaya en 1767. Pour gagner sa liberté il fut confronté aux 10 meilleurs combattants de l’armée Birmane. Il terrassa ses adversaires un à un et fut libéré. Naï Khanom Tom est toujours un héros national, vénéré par les pratiquants de boxe thaïe. Un gala de boxe, la Nuit des Boxeurs, est d’ailleurs organisé chaque année à sa mémoire.
Aux XIXe et XXe siècles, à la suite de nombreux accidents, la boxe thaïlandaise fut considérée comme un sport dangereux et mortel en raison de l’absence de règles. En conséquence, sa pratique fut interdite.
Les potentialités mortelles de cette discipline avaient été à l’origine de son interdiction totale en 1921, un mal pour un bien, puisqu’elle réapparut dès 1930 avec des règles contemporaines, plus protectrices pour les boxeurs…
Assister à des combats de boxe Thaïlandaise pendant son séjour en Thaïlande
Bangkok compte deux stades principaux, Rajadamnern et Lumpinee, le second étant moderne et doté d’une grande capacité depuis son déménagement récent au Nord de la capitale. Les évènements sont quotidiens et ces deux stades alternent les jours de combat. Les prix des billets d’entrée pour une soirée de combat (entre 5 et 12 combats selon les soirs) s’échelonnent généralement de 1000 à 3000 bahts, soit de 43 à 130 $, selon la proximité du siège par rapport au ring pour les étrangers. Bangkok est le seul endroit en Thaïlande où il existe, en effet, 2 tarifications. Dans les campagnes ces soirées de boxe sont gratuites ou à un prix modique, mais difficiles à intégrer à un séjour privatif en Thaïlande car les dates de ces évènements dans les temples de province dépendent souvent du calendrier lunaire, impénétrable pour le commun des mortels hors de la vie monastique….
Les combats importants sont retransmis tous les samedis et dimanches par les chaînes de télévision, et nombre de thaïlandais ne manquent jamais ce rendez-vous ! Nous avons parfois pu assister à des rues désertées à Bangkok pendant 2h alors qu’un des grands champions de Thaïlande était défié par un challenger.
Sur les programmes des combats, il n’est pas rare de croiser des drapeaux de toutes sortes : États-Unis, France, Canada, Australie, Pays Bas… de nombreux étrangers, souvent établis temporairement dans le royaume pour s’y entrainer, montent sur le ring et défient les locaux dans leur propre discipline, rivalisant avec leur niveau. Certains y ont acquis leurs lettres de noblesse comme le Hollandais Ramon Decker (un des premiers à avoir défié et battu des thaïlandais dans leur discipline et dans leur pays), le Français Danny Bill et tant d’autres… Dans son film, certes très romancé, Shok Dee (bonne chance), le champion Dida y raconte sa difficile mais victorieuse épopée dans ce monde très particulier de la boxe Thaïlandaise.
Le Muay Thai en 2020
Aujourd’hui, le Muay Thaï est une grande industrie en Thaïlande, qui fait vivre environ 200 000 personnes (pour une population de 69,43 millions), et on estime à 100 000 le nombre de pratiquants réguliers en Thaïlande.
La Thaïlande reste l’écrin des plus grands champions internationaux de boxe thaïlandaise dont la vie à changer grâce à la pratique de cette discipline. Le boxeur Buakaw, originaire de la région pauvre et reculée de Surin est un des contemporains les plus célèbres internationalement, avec un impressionnant palmarès de 274 combats professionnels et 259 victoires ! Un modèle pour de nombreux jeunes Thaïlandais et Thaïlandaises…
Parallèlement de nombreux clubs se sont installés dans les sites touristiques proposant une expérience qui n’a bien souvent pas grand-chose d’authentique au-delà du nom de la discipline. Nombre d’hôtels proposent aussi une familiarisation à cette discipline pour leurs clients. Pour ceux qui souhaitent profiter de leur sejour privatif en Thaïlande pour s’initier à ce sport, nous vous recommandons le plus grand soin dans le choix de votre camp d’entrainement.
Pour les voyageurs qui aimeraient creuser davantage cette tradition locale, nous ne pouvons que vous recommander l’excellente étude participative de l’ethnologue Stéphane Rennesson : Les coulisses du muay thaï : anthropologie d’un art martial en Thaïlande, Les Indes savantes, 2012.